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Par metanoia1 le 18 Janvier 2012 à 22:06
LA GNOSE
CHRÉTIENNE
Pierre SOISSON
Le mot gnose provient du grec gnosis qui signifie
connaissance. Il qualifie une connaissance de la divinité,
provenant non d'un enseignement quelconque, d'une étude
intellectuelle, mais d'une intuition profonde, de ce que Bergson
appellera une « prise immédiate de conscience » 1 qui nous
permet de saisir les mystères aptes à assurer notre salut.
Toutes les religions, à ce titre, connaissent une gnose.
C'est une connaissance existentielle qui, science en même temps
que sagesse, modifie la croyance et le comportement, transforme
l'homme dans son ensemble.
Les textes sacrés peuvent être compris de deux
manières : ou bien on s'en tient au sens littéral, ou bien on
considère qu'ils ont un sens symbolique, caché. C'est là une des
différences entre religions ésotériques et religions exotériques.
Dès les premiers temps de l'homo sapiens, dès que les
représentants archaïques de notre espèce se sont posé des
questions sur l'origine de l'univers et sur le rôle de l'homme en ce
monde, comme sur ses fins dernières, autrement dit, dès la
naissance de la conscience interrogative, la réponse religieuse
s'est imposée. C'est ce qu'exprime Schopenhauer quand il écrit
que l'homme est un animal essentiellement religieux nous
pensons, pour notre part, qu'il ne l'est qu'existentiellement c'est
ce qu'Auguste Comte a bien observé, découvrant ce qu'il appelle
« l'état théologique ». À partir de ce moment, une tradition
mythique se crée et certains hommes cherchent à inscrire audelà
des mots des vérités essentielles. D'où le rôle considérable du
symbolisme dans toutes les mythologies. D'où, dans des temps
plus proches de nous, la naissance d'une gnose égyptienne, d'une
gnose juive, d'une gnose iranienne, d'une gnose chrétienne, d'une
gnose islamique. Évidemment, dans notre propos, c'est la gnose
chrétienne qui nous intéresse particulièrement et, si nous devons
1 Henri BERGSON, Les deux sources de la morale et de la religion.
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faire référence à des gnoses d'autres origines, c'est uniquement au
regard des influences qu'elles auraient pu avoir sur le
christianisme.
Les Pères de l'Église considèrent la gnose chrétienne
comme une hérésie, bien que Tertullien écrive : « L'hérésie est
toujours postérieure à l'orthodoxie » 2 et que la gnose chrétienne
soit bien antérieure au Concile de Nicée qui a jeté les bases de
l'orthodoxie chrétienne. C'est ce qui a dû faire dire à Hippolyte :
« Les premiers Chrétiens ne s'appelèrent pas Nazaréens car
l'hérésie nazaréenne existait avant le Christ et ne le connaissait
pas ». Une hérésie antérieure au dogme ? Bizarre… mais la
logique et les Pères de l'Église ne font pas toujours bon ménage.
La gnose chrétienne se situe dans le grand courant qui
réunit Platon et Plotin, Hermès Trismégiste (IV ème siècle avant
notre ère) et Philon d'Alexandrie, Clément d'Alexandrie et
Origène. S'il existe d'autres gnoses comme celle de la Merkhaba,
comme celles des différents écrits apocalyptiques de la Bible,
comme celle de la vision d'Ézéchiel ou de la Kabbale, en ce qui
concerne le judaïsme, si le manichéisme ou le mandéisme,
comme certaines tendances islamiques, relèvent de la même
tournure d'esprit, la gnose chrétienne plonge ses racines dans la
tradition grecque. Renan l'a fort bien remarqué lorsqu'il écrit,
comparant le christianisme gnostique et le christianisme
catholique : « La grande différence consiste essentiellement en ce
que les conceptions gnostiques représentent une sécularisation
portée à son plus haut point, une hellénisation radicale et
prématurée du christianisme avec rejet de l'Ancien Testament ; le
système catholique, au contraire, une sécularisation d'une
hellénisation qui s'est faite graduellement et en conservant
l’Ancien Testament ».
Notre point de vue diffère cependant de celui de
Renan. Celui-ci pose en effet comme postulat de base
que le christianisme a pour origine le judaïsme et qu'il
s'est hellénisé par la suite, brutalement dans le cas de la
gnose, graduellement en ce qui concerne le catholicisme.
Nous pensons plutôt que le christianisme, d'origine
2 TERTULLIEN, Apologia.
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païenne, a subi, à un moment donné, une judaïsation. La
gnose représente un refus partiel de cette judaïsation,
alors que le catholicisme l'a acceptée.LA GNOSE CHRÉTIENNE
Pierre SOISSON
Le mot gnose provient du grec gnosis qui signifie
connaissance. Il qualifie une connaissance de la divinité,
provenant non d'un enseignement quelconque, d'une étude
intellectuelle, mais d'une intuition profonde, de ce que Bergson
appellera une « prise immédiate de conscience » 1 qui nous
permet de saisir les mystères aptes à assurer notre salut.
Toutes les religions, à ce titre, connaissent une gnose.
C'est une connaissance existentielle qui, science en même temps
que sagesse, modifie la croyance et le comportement, transforme
l'homme dans son ensemble.
Les textes sacrés peuvent être compris de deux
manières : ou bien on s'en tient au sens littéral, ou bien on
considère qu'ils ont un sens symbolique, caché. C'est là une des
différences entre religions ésotériques et religions exotériques.
Dès les premiers temps de l'homo sapiens, dès que les
représentants archaïques de notre espèce se sont posé des
questions sur l'origine de l'univers et sur le rôle de l'homme en ce
monde, comme sur ses fins dernières, autrement dit, dès la
naissance de la conscience interrogative, la réponse religieuse
s'est imposée. C'est ce qu'exprime Schopenhauer quand il écrit
que l'homme est un animal essentiellement religieux nous
pensons, pour notre part, qu'il ne l'est qu'existentiellement c'est
ce qu'Auguste Comte a bien observé, découvrant ce qu'il appelle
« l'état théologique ». À partir de ce moment, une tradition
mythique se crée et certains hommes cherchent à inscrire audelà
des mots des vérités essentielles. D'où le rôle considérable du
symbolisme dans toutes les mythologies. D'où, dans des temps
plus proches de nous, la naissance d'une gnose égyptienne, d'une
gnose juive, d'une gnose iranienne, d'une gnose chrétienne, d'une
gnose islamique. Évidemment, dans notre propos, c'est la gnose
chrétienne qui nous intéresse particulièrement et, si nous devons
1 Henri BERGSON, Les deux sources de la morale et de la religion.
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faire référence à des gnoses d'autres origines, c'est uniquement au
regard des influences qu'elles auraient pu avoir sur le
christianisme.
Les Pères de l'Église considèrent la gnose chrétienne
comme une hérésie, bien que Tertullien écrive : « L'hérésie est
toujours postérieure à l'orthodoxie » 2 et que la gnose chrétienne
soit bien antérieure au Concile de Nicée qui a jeté les bases de
l'orthodoxie chrétienne. C'est ce qui a dû faire dire à Hippolyte :
« Les premiers Chrétiens ne s'appelèrent pas Nazaréens car
l'hérésie nazaréenne existait avant le Christ et ne le connaissait
pas ». Une hérésie antérieure au dogme ? Bizarre… mais la
logique et les Pères de l'Église ne font pas toujours bon ménage.
La gnose chrétienne se situe dans le grand courant qui
réunit Platon et Plotin, Hermès Trismégiste (IV ème siècle avant
notre ère) et Philon d'Alexandrie, Clément d'Alexandrie et
Origène. S'il existe d'autres gnoses comme celle de la Merkhaba,
comme celles des différents écrits apocalyptiques de la Bible,
comme celle de la vision d'Ézéchiel ou de la Kabbale, en ce qui
concerne le judaïsme, si le manichéisme ou le mandéisme,
comme certaines tendances islamiques, relèvent de la même
tournure d'esprit, la gnose chrétienne plonge ses racines dans la
tradition grecque. Renan l'a fort bien remarqué lorsqu'il écrit,
comparant le christianisme gnostique et le christianisme
catholique : « La grande différence consiste essentiellement en ce
que les conceptions gnostiques représentent une sécularisation
portée à son plus haut point, une hellénisation radicale et
prématurée du christianisme avec rejet de l'Ancien Testament ; le
système catholique, au contraire, une sécularisation d'une
hellénisation qui s'est faite graduellement et en conservant
l’Ancien Testament ».
Notre point de vue diffère cependant de celui de
Renan. Celui-ci pose en effet comme postulat de base
que le christianisme a pour origine le judaïsme et qu'il
s'est hellénisé par la suite, brutalement dans le cas de la
gnose, graduellement en ce qui concerne le catholicisme.
Nous pensons plutôt que le christianisme, d'origine
2 TERTULLIEN, Apologia.
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païenne, a subi, à un moment donné, une judaïsation. La
gnose représente un refus partiel de cette judaïsation,
alors que le catholicisme l'a acceptée.
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